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Oscherus In Musica
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24 août 2011

Prön Flåvurdik - Opus 3: The Motown Years

PRON-FLAVURDIK-Opus-trois

 Style: Drone Doom Psychédélique

Année: 2008

Format: album

Label: Paradigm Records

Site : http://www.myspace.com/pronflavurdik

Pays : France

 

01- Opus 3 : The Motown Years

  

Formé à Rouen en deux mille quatre par Samuel Antonin (batterie) et Benjamin Rouchaville (guitares, claviers), tous deux rescapés de Burn Hollywood Burn, et de Thomas Pelikan (chant, claviers), transfuge de Buckaroo Banzaï, Prön Flåvurdik ne tarda pas à se faire remarquer avec son premier disque, dénommé Teaser n°1, proposant un cocktail détonnant entre rock hérité de la fin des années soixante dix et lourdeur que n’aurait pas renié les Melvins. Le groupe se distingua deux ans plus tard par le très bon Blåck Shåbbäth où le trio se trouva rejoint par deux cuivres, prenant une démarche volontiers plus expérimentale, - ce disque fut d’ailleurs enregistré deux années avant la sortie d’un certain Monoliths & Dimensions – et surtout encore plus lourde et noire. Revenu à trois, le groupe proposa finalement en deux mille huit le présent Opus 3 : The Motown Years, qui vient tout juste d’être réédité par le label anglais Paradigm Records. Et le moins que l’on puisse dire à l’écoute de cet album, c’est que le trio est loin d’avoir pris les voies de la facilité mais a surtout accomplit un excellent travail.

 

Le groupe nous propose en effet ici un seul titre de trente huit minutes. L’exercice est assez périlleux en soi, car il n’est pas rare de perdre le fil au fur et à mesure que les minutes s’égrainent. Cela n’est nullement le cas ici, tant le trio maîtrise parfaitement son sujet et sait justement captiver l’auditeur en l’entraînant dans des chemins souvent tortueux, parfois en l’apaisant pour mieux l’agresser par la suite. Si pour le simple quidam, le drone se résume le plus souvent à des bourdonnements répétés inlassablement jusqu’à plus soif avec un côté monolithique des plus rébarbatifs, il n’en est rien chez Prön Flåvurdik. Outre le talent, le groupe est surtout particulièrement inspiré, notamment cette machine à riffs qu’est Benjamin Rouchaville. En effet, dans ce genre de musique basée sur la répétition, l’on peut rapidement échouer faute de riffs géniaux : c’est loin d’être le cas ici, avec en plus la parfaite maîtrise du riff à trois notes qui vous scotche d’emblée.

 

Bien évidemment, l’ombre d’un Earth ou d’un SunnO))) est présente chez ce groupe, mais sa démarche est plutôt à rapprocher des travaux de John Zorn, notamment avec Naked City voire avec Painkiller, en gardant toutefois ce groove digne des Melvins. S’ajoutent à cela une très bonne utilisation des claviers, avec des sonorités analogiques ô combien appréciables, et qui sont souvent utilisés en nappe, donnant un aspect hypnotique à l’ensemble. L’on notera d’ailleurs que ce côté encore plus touffu de la musique et le parti pris pour un propos encore plus jusqu’au-boutiste caractérisent bien cet opus par rapport à ces deux prédécesseurs, même si ce n’est rien par rapport au Pron Addicted Ensemble. Autrement, l’apparition du chant, bien venu, constitue aussi l’une des grandes nouveautés de cet opus. Et il faut avouer que Thomas Pelikan est assez sidérant sur cet opus.

 

C’est ainsi un voyage auditif vraiment captivant qui est proposé sur ces quelques trente huit minutes. Les rouennais savent alterner intelligemment passages brutaux et bien rentre dedans, à d’autres on ne plus plombés et lents à faire pâlir messieurs Anderson et O’Malley. S’ajoute à cela des passages bien plus groovy que l’on aurait pu voir sortir tout droit d’un Houdini ou d’un Stoner Witch. Si le côté un peu patchwork de l’ensemble peut parfois dérouter, cela reste toutefois de la haute voltige, sans sombrer dans la démonstration stérile, bien que les plans de batterie de Samuel Antonin soient tout bonnement excellents. Par contre le groupe ne fait pas du tout dans la facilité pour accueillir l’auditeur : les dix premières minutes du titre sont on ne peut plus violentes et dérangeantes, alternant passages à la limite du grindcore avec notamment des hurlements démentiels de la part de Thomas Pelikan et des patterns de batterie on ne peut plus furieux, avec d’autres assez expérimentaux.

 

Après cette entrée en matière, le trio nous proposera un riff, pour ne pas dire le riff, qui sera répété inlassablement pendant de longues minutes, voyant les claviers répondre à la guitare, avant que l’intensité ne monte au fur et à mesure, et ainsi de suite jusqu’à la fin du morceau. Si l’assimilation d’une telle musique et d’un tel morceau n’est pas des plus aisées, ce titre recèle tout de même de magnifiques trouvailles, toutes plus géniales les unes que les autres. En cela, la démarche du groupe se rapproche du progressif, car si le groupe s’épanche souvent à répéter les mêmes motifs inlassablement pendant de longues minutes, les structures sont quant à elles nullement récurrentes. D’autre part, le groupe touche vraiment à tout durant le développement de ce titre, ce qui fait que l’on peut avoir des passages assez noirs, voire parfois même assez malsains, et tomber sur d’autres plus lumineux et entraînant comme sur le final.

 

Si le groupe prend le parti pris d’une certaine redondance, il n’en installe pas moins une ambiance assez unique et maîtrise à la perfection les montées en intensité tout comme les accalmies. Loin de se contenter de répéter des schèmes repris ça et là parmi ses influences, le trio affiche avant toute chose une réelle personnalité et surtout fait preuve d’une très grande originalité. Par contre, il ne s’agit pas ici d’un exercice de style prétexte à des prétentions artistiques superflues et arrogantes auxquelles nous sommes fréquemment confrontés. De plus, le trio ne se réfugie pas non plus derrière un amalgame sonore et un son d’une rare épaisseur pour masquer des carences, notamment dans l’exécution qui est magistrale tout le long de cet opus. C’est sans doute là l’un des atouts du groupe qui force le respect, en sachant d’autant plus que ce disque été enregistré dans le local de répétition du groupe dans les conditions du live. Autant dire que nous avons ici une chaleur et une ampleur dans le son dignes des groupes des années soixante dix.

 

Je ne vais m’étendre plus longuement sur cet album qui est tout bonnement excellent, mais qui demandera sans doute un effort particulier pour être pleinement apprivoisé. Les fans des références suscitées devraient retrouver leur compte. Cela constitue une expérience auditive à part. Dans tous les cas cet Opus 3 est une très bonne réussite et surtout la preuve que l’originalité est encore de ce monde. Autant vous dire que cette réédition est on ne peut plus méritée car ce groupe mérite largement que l’on s’y intéresse, d’autant que le prochain opus s’annonce tout simplement dantesque. (8,5/10)

 

Nota Bene : la pochette présentée ici est celle de la réédition de deux mille onze par le label Paradigm Records, l’édition originale comprenait une pochette différente.

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